Saint Augustin

Les grandeurs du Christ dans sa mort

1. 

Depuis des siècles nombreux, frères bien-aimés, il a été prédit de notre Seigneur et sauveur qu’il «s’élèvera comme un arbrisseau et comme une racine d’une terre aride». Pourquoi comme une racine ? Parce qu’il «n’a ni éclat ni beauté». Il a souffert, il a été humilié, conspué : il était alors sans beauté; il était Dieu et on ne voyait en lui que l’homme. Mais si la racine n’est pas belle en elle-même, elle a une vigueur intérieure qui fait son mérite. Ecoutez, mes frères, et considérez la miséricorde de Dieu.

Voici un arbre magnifique, délicieux, son feuillage est vert, il est chargé de fruits. On admire cet arbre, on se plaît à en cueillir quelques fruits, à s’asseoir sous son ombre, à s’y abriter contre la chaleur. Tout cela est beau. Qu’on te montre la racine, tu n’y vois rien à admirer. Ne la méprise pas néanmoins; cette partie abjecte est la principe de ce qui te ravit. C’est pourquoi le Christ est comparé à la racine qui sort d’une terre aride. Contemplez maintenant cet arbre dans sa gloire.

L’Eglise a grandi, les Gentils ont reçu la foi, les princes de la terre ont été vaincus au nom du Christ afin d’être vainqueurs dans l’univers. Ils ont courbé la tête sous le joug du sauveur. Autrefois ils persécutaient les chrétiens à cause de leurs idoles, ils renversent maintenant les idoles à cause du Christ. Dans toutes les calamités et toutes les angoisses tous ont recours à l’Eglise. C’est le grain de sénevé qui a grandi et qui s’est élevé au-dessus de toutes les plantes; les oiseaux du ciel, c’est à dire les orgueilleux du siècle accourent et reposent sous ses rameaux !

D’où lui vient tant de beauté ? Cette beauté si honorée vient de je ne sais quelle racine. Cherchons celui qui est cette racine. Il a été conspué, humilié, flagellé, crucifié, blessé, méprisé. Ici donc il est sans beauté : mais quelle gloire il a dans l’Eglise ! C’est ici la description de l’Epoux, de l’époux dédaigné, déshonoré, rejeté. Mais vous pouvez voir à l’instant même l’arbre sorti de cette racine; il couvre l’univers. «Racine d’une terre aride »

Il est sans éclat et sans gloire; et nous l’avons vu : il n’avait ni éclat, ni beauté» - «N’est-ce pas le fils du charpentier ?». Ne fallait-il pas qu’il fut étrangement privé de cette beauté mystérieuse quand on disait : «