Saint Cyprien

Cyprien de Carthage

Ouvrage de référence : Lire les pères de l'Eglise de Soeur gabriel Peters.

1. 

Sa vie

Il est né en Afrique, et très probablement à Carthage, vers 200/210. Sa famille étant riche et cultivée, il fit de très bonne études et devint un brillant rhéteur. Il s'accommodait parfaitement de la "foire aux plaisirs" qu'était Carthage, lorsque sous l'influence du prêtre Caecilius, il se convertit en 245 :

Lorsque je gisais dans le noir d'une aveugle nuit, privé dans mon inconsciente vie, de la lumière et de la vérité, je trouvais, à cause de ma propre conduite, bien pénible à avaler le salut promis par la miséricorde de Dieu. Renaître de nouveau, sortir de sa vieille peau pour se revigorer au contact de l'eau salutaire; changer d'âme et de mentalité et cela sans perdre son corps, impossible, me disais-je, un tel retournement ! Impossible d'évacuer tout ce qui, né en moi, y a creusé son trou, impossible d'évacuer tout ce qui, venu du dehors, a pris racine en moi ! (Lettre à Donat)

Il se fait chrétien et donne toute sa fortune aux pauvres.

Grâce à l'eau qui fait renaître, je fus lavé de mon passé de péché, et d'en haut une lumière se répandit dans mon coeur contrit, calme et pur. Une seconde naissance me restaura. Admirable volte-face, je fus un homme nouveau... La vie reconnue terrestre et née de la chair fut désormais tout animée de l'Esprit de Dieu. Telle est l'oeuvre de Dieu, oui de Dieu ! Tout ce que nous pouvons vient de Dieu !

L'oeuvre de Tertullien devient sa lecture préférée et il se considérera toujours comme un de ses disciples. En 248 il devient évèque de Carthage par "le jugement de Dieu et le suffrage du peuple" écrit Pontius qui ajoute : "On allait cueillir les fruits mûrs de cet arbuste à peine planté". Veillant sur la sainteté des vierges, il leur consacre un traité De habitu virginium.

Persécution de Dèce

En 250 l'empereur Dèce ordonne que tous les citoyens participent à un sacrifice général, le but étant de renforcer autour de la religion, l'unité de l'empire. La plupart des chrétiens apostasient, certains ayant pu acheter un certificat qui prouve qu'ils ont sacrifié. Cyprien doit s'exiler et se cacher "selon les enseignements du Seigneur"; il cherche moins à sauver sa peau qu'à la paix de la communauté. Il demeure durant cette période en liaison étroite avec Rome et doit s'occuper de la question des lapsi, les apostats : les confesseurs donnaient aux lapsi qui en faisaient la demande un billet, afin que leur pénitence soit agréée par Dieu, ce billet leur assurant l'intercession des martyrs en laquelle les chrétiens avaient grande foi. Cyprien demande qu'on accorde ce billet qu'avec discernement et nominativement au lieu de billets portant "communion pour lui et les siens". Car certains confesseurs considéraient un peu trop que "ce ne sont pas les martyrs qui font l'Evangile mais l'Evangile qui fait les martyrs".

Le martyre

Il faut bien comprendre que pour les empereurs païens, les chrétiens sont des athées et des traîtres à la patrie qui méritent la mort. Origène est torturé sous Gallus (251-253), les papes Fabien, Etienne et Sixte II sont martyrisés. Cyprien est arrêté à son tour le 30 août 257 et exilé à Curube à cinquante kilomètres. Mais au bout d'un an, le proconsul Aspasius Paternus le fait ramener à Carthage pour organiser son procès qui a lieu le 14 septembre 258. La séance fut brève :

Le Proconsul : Es-tu Thascius Cyprianus ?
Cyprien : Je le suis.
Le Proconsul : Tu t'es présenté comme le pape des hommes sacrilèges.
Cyprien : Oui.
Le Proconsul : Les très saints empereurs ordonnent que tu fasses les sacrifices aux dieux.
Cyprien : Je n'en ferai rien.
Le Proconsul : Prends garde à toi !
Cyprien : Fais ce que tu crois devoir faire. Le cas est assez clair pour éviter les longs conseils.

Troublé par cette tranquille assurance, le tribunal hésite sur son sort et c'est d'une voix peu assurée que le Proconsul délivre finalement la sentence : "châtié par le glaive" (décapité). De nombreux chrétiens de Carthage qui s'étaient pressés en foule autour du tribunal l'accompagnent sur le lieu du supplice et lui font des funérailles triomphales en dépit des menaces du pouvoir.

Après la paix constantinienne de 313, les chrétiens de Carthage élevèrent à l'emplacement même de sa décollation une vaste basilique à sept nefs nommée Mensa Cypriani (Table de Cyprien). Saint Augustin y précha à plusieurs reprises pour célébrer sa mémoire.